Catalunya : Une victoire pour les indépendantistes, un revers pour les nationalistes.

Publié le par Section Pcf Vierzon

Leurs divergences pourraient entraver l’organisation d’un référendum. Les quatre partis indépendantistes ont emporté, dimanche, la majorité absolue des sièges disputés lors des élections régionales anticipées en Catalogne. Mais le premier d'entre eux, la coalition Convergence et union (CiU, centre droit), n’a pas obtenu autant de sièges que souhaité

4961566-7407851.jpgSi les indépendantistes sont désormais majoritaires en Catalogne, le résultat des élections de dimanche n'est certes pas celui qu'espérait Artur Mas, le président de cette région d'Espagne. La coalition Convergence et union, à laquelle appartient le président catalan Artur Mas, emporte seulement 50 des 135 sièges qui composent l'Assemblée, contre 62 auparavant.

En revanche, le parti historique de la gauche indépendantiste catalane, ERC (Esquerra republicana de Catalunya), fait plus que doubler son score, avec 21 sièges contre dix. Les socialistes, en recul, deviennent le troisième parti régional (20 députés), devant le Parti populaire, de droite, au pouvoir à Madrid (19 sièges).

Un succès parce que deux tiers des députés élus appartiennent à des formations indépendantistes. Artur Mas a certes perdu son pari mais Josep Bonet, militant de CIU préfère voir le bon côté des choses, il est persuadé qu'un référendum d'auto détermination pourrait être organisé avec l'aide des autres partis nationalistes : "Non, je ne suis pas du tout déçu parce que de toute façon même si Convergencia i Unio n'a pas la majorité absolue, je pense qu'il aura la possibilité, Convergencia i Unio de s'allier avec Esquerra Republicana à la recherche d'indépendantistes".

Le scrutin de dimanche a atteint un taux de participation record, avec 68% des électeurs s'étant exprimés, soit 10 points de pourcentage de plus que lors des précédentes élections, deux ans auparavant. "C'est la plus forte participation enregistrée en Catalogne lors des huit derniers scrutins, depuis 1988", a déclaré la vice-présidente de la Généralité de Catalogne, Joana Ortega, à la mi-journée.

Les enquêtes d'opinion montrent aujourd'hui que 44% à 57% des Catalans seraient prêts à franchir le pas d'un Etat indépendant, des niveaux jamais atteints auparavant.

La situation risque d'être tendue pour Arthur Mas, son parti, Convergència i Unió (CiU), recueille plus que 30,68% des voix (un recul de -7,75%) il perd 12 députés sur les 62 qu'il détenait depuis 2010. Bien qu'arrivé second le Partit dels Socialistes de Catalunya (branche régionale du PSOE) continue sa dégringolade, il ne recueille plus que 14,43% des voix (-3,95%), il perd 8 députés (20).

Cette érosion électorale profite aux autres partis, notamment à Esquerra Republicana de Catalunya (ERC), parti de gauche (socialisme démocratique) indépendantiste en coalition avec Solidaritat Catalana per la Independència (SI). L'ERC recueille 496.292 voix et 13,68% des suffrages une progression de +6,68 points. L'ERC dispose désormais de 21 députés (+11). Le Partit Popular de Catalunya (PPC), branche locale du PP de Rajoy, reste stable 12,99% (+0,92%) et gagne un député (19). Les Ciutadans - Partit de la Ciutadania (C's), parti libéral anticatalan recueille 7,58% des voix (+4,19%), il bénéficie du vote pro-espagnol et gagne 6 députés (9). La Candidatura d'Unitat Popular (CUP), parti indépendantiste de gauche (écosocialisme) parvient a constituer un groupe parlementaire , il obtient 3,48% des voix et 3 députés.

Pour Iniciativa per Catalunya Verds - Esquerra Unida i Alternativa (ICV-EUiA), branche locale de Izquierda Unida (EUiA), la progression est importante, ICV-EUiA recueille 9,89% des voix (+2,52%) et obtient 3 députés de plus (13).

Quel bilan pour la Catalogne ?

Les indépendantistes ont gagné les élections, CiU + ERC + CUP cumulé donne 74 députés, soit 6 de plus que la majorité. D'un point de vue électoral le vote populaire pour les partis indépendantistes ne donne pas la majorité, en effet ces trois partis recueillent 47,84% des suffrages (en recul par rapport à 2010 ou les partis indépendantistes recueillaient 48,72% des voix). Pourtant les pro-Espagne, ne sortent pas vainqueur de ces élections. Si le PP et le C's obtiennent des députés supplémentaires, le PSC continue sa chute. Les partis espagnols obtiennent 48 députés et 35% des suffrages des catalans (34,14% en 2010).

Iniciativa per Catalunya Verds - Esquerra Unida i Alternativa (ICV-EUiA) est une coalition que l'on peut qualifier de pro-catalane, mais pas indépendantiste, il s'agit d'une coalition républicaine et fédéraliste. Elle joue un rôle pivot dans l'espace politique catalan, elle occupe l'espace historique du PSUC (Partit Socialista Unificat de Catalunya, devenu ICV). Avec ces 9,89% ICV-EUiA recueille un vote, non pas d'opposition à l'indépendance, mais un vote de classe contre les politique d'austérité de la CiU comme du PP. Arthur Mas, si il échoue à s'imposer c'est surtout parce que les solutions de rigueur menée en Catalogne, comme en Espagne, comme en Grèce, comme au Portugal, ne sont pas des recettes pour sortir de la crise, et agiter l'éventail de l'indépendance n'a pas détourner les catalans de leurs préoccupations quotidiennes, ni donné de réponse au chômage massif et à la précarité.

La Catalogne a besoin du socialisme, la progression des partis indépendantistes et socialistes est plutôt le meilleurs encouragement. ERC, CUP et ICV-EUiA recueillent 27,05% et 37 députés. 4961566-7408199.jpg

Les Catalans se sont déplacés massivement, dimanche, et ont voté en faveur d'une autonomie accrue, tout en sanctionnant le dirigeant nationaliste catalan, Artur Mas. Tentatives d'éclaircissements, avec Cyril Trépier, chercheur à l'Institut Français de Géopolitique de Paris 8*. 

Quelles sont les principales leçons à tirer de ce scrutin ?

Il ne s'est pas résumé à un bras de fer du dirigeant nationaliste catalan Artur Mas avec le Président du gouvernement espagnol Mariano Rajoy. La scène catalane est beaucoup plus complexe que cela. 

Le fait d'être 'pour ' ou 'contre' l'indépendance ne suffit pas, pour les électeurs, à déterminer un programme 

Avec 69,5% de participation, la mobilisation pour des élections régionales a été exceptionnelle. Habituellement, les Catalans se mobilisent surtout pour les scrutins de dimension espagnole. Mais après l'énorme manifestation du Jour de la Catalogne, le 11 septembre, à l'appel des indépendantistes, l'accent de ce scrutin avait été mis, pour la première fois, sur la question de l'indépendance. Cela a conduit les Catalans à se déplacer massivement pour aller voter.  

Pourtant, on constate que le fait d'être 'pour ' ou 'contre' l'indépendance ne4961566-7407853-copie-1.jpg suffit pas, pour les électeurs, à déterminer un programme. Cette question n'est pas parvenue à occulter les clivages idéologiques droite/gauche. Enfin une autre surprise vient aussi du résultat du petit parti de centre gauche opposé à l'indépendance, Ciutadans, passé de 3 à 9 sièges. 

Comment expliquer l'échec relatif de CiU, la fédération d'Artur Mas, qui est passée de 62 sièges en 2010 à 50, dimanche?

D'une part, il paie les mesures d'austérité budgétaire qu'il a adoptées depuis son arrivée au pouvoir fin 2010 en plus de celles du gouvernement central. 

D'autre part, au sein de cette formation, il y a toujours eu cohabitation entre un courant modéré et un autre favorable à l'indépendance. Il semble que les voix des partisans du courant modéré aient manqué, tandis qu'une frange de l'électorat favorable à la rupture avec Madrid a préféré apporter ses voix au parti indépendantiste ERC. Une manière de s'assurer que les engagements d'Artur Mas en faveur de l'indépendance seraient menés à leur terme. 

Hormis le recul de CiU, quel a été l'impact de la grave crise que traverse l'Espagne sur les élections de dimanche ?

Le parti écolo-communiste ICV, parmi ceux qui ont le plus parlé de la question sociale au cours de la campagne, a tiré profit de cet engagement en passant de 10 à 13 sièges.
L'entrée au parlement du parti d'extrême gauche indépendantiste CUP, avec 3 députés en est un autre marqueur. Ce petit parti, trait d'union entre le mouvement des Indignés et les indépendantistes ne s'était jamais présenté à un scrutin régional malgré une implantation ancienne. Il s'est beaucoup impliqué, ces derniers mois, dans les mobilisations contre les expropriations. Une partie de l'électorat lui en a su gré.  

Le grand vainqueur du scrutin est le parti indépendantiste ERC, comment le définir ?

ERC est l'héritier du parti majoritaire en Catalogne à l'époque de la république, entre 1931 et 1936. Il se proclame de gauche, mais son positionnement est davantage axé sur la question de l'indépendance que sur un clivage idéologique. Le bon score qu'il a réalisé dimanche (21 sièges) n'est cependant pas une première. Il avait déjà obtenu 23 sièges en 2003. S'il devient le deuxième parti de l'Assemblée aujourd'hui, c'est aussi en raison du net recul du parti socialiste catalan, le PSC (de 28 à 20 sièges). 

Le Parti socialiste catalan souffre du bilan de son alter égo à l'échelon national ?

Oui, en effet, mais il paie aussi le flou de son message sur l'avenir institutionnel de la Catalogne. Le parti est assez divisé quant à la question de l'indépendance. Il se veut fédéraliste, mais son projet fédéral est assez peu élaboré. Aussi peu d'ailleurs que l'est le projet de société indépendantiste. 

C'est à dire...

Le flou qui caractérise encore le projet d'indépendance lui donne aussi son attrait 

L'essentiel de la promotion de l'idée d'indépendance s'est faite par défaut. On attribuait tous les maux actuels de la Catalogne à son statut au sein de l'Espagne. Mais le flou qui caractérise encore le projet lui donne aussi son attrait: l'indépendance peut ainsi séduire des gens aux conceptions et intérêts très différents.  

L'idée d'une indépendance de la Catalogne a quand même fait un pas en avant dimanche...

Oui, même si les résultats d'hier ne sont pas transposables à un référendum d'autodétermination.  

La promotion de l'indépendance ne se limite pas aux partis. Il y a tout un réseau d'associations locales qui font du porte à porte depuis des années, s'en faisant les promoteurs. De nombreux conseils municipaux et 552 référendum locaux ont "approuvé l'indépendance" entre 2009 et 2011.  

Les nationalistes s'efforcent d'ailleurs aussi de courtiser les "nouveaux Catalans", ceux issus de l'immigration ancienne, à partir des années 60 - en provenance des régions les plus pauvres d'Espagne - mais aussi ceux arrivés plus récemment, comme les travailleurs marocains. Il s'agit d'élargir la base des partisans de la rupture avec Madrid, souvent plus présents dans les circonscriptions à la fois urbaines et rurales que dans le coeur des principales agglomérations. 

CiU va maintenant vraisemblablement former une coalition avec ERC, et a confirmé son engagement de convoquer un référendum sur l'indépendance dans les 4 ans qui viennent.

BLOG/PCF Vierzon.

Publié dans INTERNATIONAL

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J
<br /> Je ne vois pas l'interêt d'une indépendance de la catalogne et les arguments affichés dans cet article ne sont absolument pas convaincants. L'intérêt est plutôt l'unir tous les progressistes<br /> espagnols pour  qu'ils ouvrent ensemble, au delà des frontières des Régions du pays, une perspective réellement crédible de changement social et de lutte contre la crise, l'austérité et la<br /> dictature des marchés financiers qui étrangle  tous les salariés du pays, catalans ou non.... <br />
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